Le RAVAD a tenu son Assemblée Générale dans la salle de la commission des lois du Sénat, à l’aimable invitation de son vice-président le Sénateur Hussein Bourgi, le vendredi 6 octobre 2023.
Par ailleurs, voici l’ introduction et la conclusion du rapport moral du président Me Jean-Bernard Geoffroy, voté à l’unanimité des associations Membres présentes et représentées.
introduction :
Chèr·e·s Ami·e·s,
Les droits des personnes LGBTQIA+ dans le monde sont loin d’être acquis et nos espérances s’amenuisent quant à leur instauration à l’échelle de la planète, quand en Ouganda, une loi aggravant la pénalisation des relations homosexuelles est adoptée par le Parlement le 21 mars 2023 et promulguée le 29 mai 2023 quelles qu’aient été les pressions internationales. Le projet initial prévoyait des peines allant jusqu’à dix ans de prison pour toute personne se livrant à des actes homosexuels ou se revendiquant comme LGBT+. Le texte définitif dispose que les actes seront passibles de la prison à vie. « Les récidivistes » pourront être condamnés à mort et la promotion de l’homosexualité peut faire encourir une peine allant jusqu’à 20 ans. Parmi les méfaits de la colonisation britannique subsistait l’illégalité « de toute relation charnelle contre nature ».
En Russie, les députés avaient déjà approuvé une loi en 2013 interdisant la « propagande » LGBT+ auprès des mineurs et le 24 novembre 2022 une nouvelle loi élargissait le champ d’interdiction défendant désormais de « faire la promotion de relations sexuelles non traditionnelles » auprès de tous les publics. Il était même introduit un amalgame pervers entre les LGBTQIA+ et les pédophiles. Le texte était ainsi rédigé « promouvoir les relations sexuelles non traditionnelles est interdit (…). Une interdiction de la promotion de la pédophilie et du changement de genre a également été introduite. »
Même au sein de la communauté européenne les droits des personnes LGBTQIA+ sont bafoués, la Hongrie a légiféré sur l’interdiction de la promotion de l’homosexualité ou du changement de sexe auprès des mineurs le 15 juin 2021 (rappel à la loi russe).
Que se passe-t-il dans nos démocraties européennes quant au cœur de l’Europe, le gouvernement danois défend la réinstauration du délit de blasphème supprimé voilà 6 années ainsi rédigées : « interdire le traitement inapproprié d’objets ayant une signification religieuse importante pour une communauté religieuse ». La rédaction de Charlie Hebdo dénonçait ce projet de loi de circonstance en ces termes « c’est grave qu’un pays européen décide de rétablir ce délit moyenâgeux ». Ce texte est aussi liberticide que sa définition est imprécise (qu’est-ce qu’un traitement inapproprié,….). La liberté d’expression doit être préservée, le délit de blasphème combattu.
Rappelons-nous qu’en 2013 au Brésil, un baiser lesbien devant une Église évangélique avait provoqué la colère d’un pasteur, qui invoquait un article du Code pénal brésilien qui « condamne le fait de tourner en dérision quelqu’un » ou « de perturber une cérémonie religieuse ».
Fort heureusement le congrès américain a adopté le 8 décembre 2022, une loi protégeant le mariage pour toutes et tous sur l’ensemble des États-Unis promulguée par le Président Joe Biden le 14 décembre 2022, mais pour autant cela signifie la montée des forces liberticides qui sont à l’œuvre dans nos démocraties. La Cour suprême avait révoqué le droit à l’avortement par une décision en date du 24 juin 2022 laissant les États américains libres d’interdire l’IVG.
Parce que nous ne sommes pas indifférents au destin des LGBTQIA+ dans tous les pays du monde, nous avons décidé depuis bien longtemps d’adhérer à ILGA Europe le 1er octobre 2012 et plus récemment à Egides le 1er décembre 2022, je vous le rappelle, dont la mission est notamment de travailler à faciliter la rencontre et la mobilisation internationale des organisations et activistes LGBTQIA+ francophones, et à favoriser la disponibilité de financements accessibles et adaptés aux enjeux, besoins et priorités des communautés LGBTQIA+ dans les espaces francophones.
Nous reviendrons plus précisément sur les avancées et insuffisances du plan triennal de lutte contre les LGBTQIAphobies, nous pouvons néanmoins saluer la création d’un fonds dédié à la lutte contre les LGBTQIAphobies à destination des ONG internationales. À l’occasion du 15ème anniversaire du groupe LGBTQIA+ des Nations unies, la ministre des affaires étrangères Catherine Colonna a confirmé la création du fonds de soutien de 2 millions d’euros qui sera destiné à défendre les droits des LGBTQIA+ dans le monde et les activistes et utilisé par les ambassades. Rappelons que l’ambassadeur pour les droits LGBT+ a été nommé par le Président de la République le 4 août 2022.
Nous savons néanmoins que nous devons poursuivre en métropole, dans les territoires et des départements ultra-marins la défense des victimes de discriminations et d’agressions à raison de leur orientation sexuelle et de l’identité de genre mais aussi de leurs caractéristiques sexuelles, particulièrement lorsque ces victimes présentent des variations du développement sexuel (intersexes) (d’où notre proposition d’extension de l’objet social) en leur apportant une aide psychologique, morale, juridique, judiciaire ou autres.
De l’enfance à la vieillesse, de la cour de récréation à l’EPHAD, le harcèlement discriminatoire peut atteindre les personnes LGBTQIA+. Les réseaux sociaux sont aussi des vecteurs dévastateurs du dénigrement, les clubs sportifs ne sont pas épargnés par les LGBTQIAphobies.
Nous constatons une recrudescence des dégradations des Centres LGBT, notamment de Tours, de Saint-Denis de la Réunion, d’Arras, de Nantes, qui soulève bien entendu notre indignation et qui nécessite une réaction des parquets compétents.
conclusion :
En conclusion, Nous nous projetons dans l’avenir pour servir la cause des personnes LGBTQIA+ en France et dans le monde quelles que soient les convulsions géopolitiques internationales mais nous n’oublions pas le passé. La proposition de loi de notre ami Hussein BOURGI qui avait été déposée le 6 août 2022 « portant réparation des personnes condamnées pour homosexualité de 1942 à 1982 » sera débattue et soumise au vote le 22 novembre prochain au Sénat.
Pour mémoire, le 4 août 1982, la loi a été promulguée abrogeant le paragraphe 2 de l’article 331 du code pénal, qui établit une discrimination à l’égard des homosexuels quant à l’âge de la majorité sexuelle.
Nous agissons aussi au présent en France (métropoles, départements et territoires ultra-marins) sans oublier nos sœurs et frères LGBTQIA+ victimes d’oppression dans le monde tout en renouvelant notre solidarité envers le peuple ukrainien mais aussi envers les migrant·es qui défiant la mort tentent de rejoindre les rives de l’Europe.
Me Jean-Bernard Geoffroy
Président du RAVAD